Le conte de fées québécois moderne « Chante, rossignol » de Marie-Hélène Poitras renverse les conventions patriarcales.

« Chante, rossignol », le nouveau roman de l’écrivaine montréalaise Marie Hélène Poitras (publié pour la première fois au Québec en 2021, maintenant dans une traduction claire et dépouillée du français par Rhonda Mullins), commence par attirer l’attention sur son propre artifice : « Sous les nuages, le village de Noirax ressemble à un petit théâtre. Des décors en carton, une scène sur laquelle délivrer des répliques, et des marionnettes qui attendent qu’une main leur donne vie, les font filer de droite à gauche, puis de gauche à droite, jusqu’à ce qu’elles disparaissent dans les coulisses. »

Il s’agit d’une approche audacieuse qui porte immédiatement ses fruits : dans « Sing, Nightingale », le lecteur est plongé dès le début dans un monde de vérités changeantes et d’histoire peu fiable, d’événements magiques et de préoccupations quotidiennes. Il ne s’agit cependant pas du type d’immersion typique, où l’on se glisse dans une simulation confortablement réaliste de la réalité ; il s’agit de quelque chose de plus profond, de plus sombre et de plus primitif.

« Les événements se déroulent dans le théâtre de marionnettes en carton du village de Noirax, dans l’obscurité de la forêt environnante et dans le domaine voisin, Malmaison (cette mise en avant de l’artifice est évidente si l’on traduit rapidement le nom du domaine : « mauvaise maison » est exactement l’essence des contes de fées).

Le domaine est la maison du père, le plus récent d’une longue lignée de pères ; il vit seul, la maison vieillissant et s’effritant autour de lui. Il semble être respecté dans le village – ou pense l’être – et entretient des relations suivies, en quelque sorte, avec les gens qui l’entourent. Sa vie est cependant bouleversée par le retour de son fils, Jeanty, qui rentre au pays après une relation désastreuse, et par l’arrivée d’Aliénor, une jeune femme envoûtante qui promet de redonner vie au domaine.

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Ce ne serait pas vraiment un conte de fées, si tout se passait comme prévu. Il suffit de dire que le père n’est pas tout ce qu’il semble être, que Jeanty revient avec ses propres secrets et qu’Alienor a son propre agenda, un agenda qui va frapper au cœur même de Malmaison et des questions qui l’entourent, bouleversant les conventions patriarcales du conte lui-même (y compris ce qui est arrivé aux femmes de Malmaison, les mères, les épouses et les maîtresses, et à leurs enfants).

Parce que « Chante, rossignol » est un conte de fées, il doit être lu comme tel. Il est préférable d’abandonner sa recherche réflexive d’idées modernistes telles que le développement des personnages et les thèmes explicites. « Chante, rossignol » est un roman aux délices subversifs, une histoire intemporelle (littéralement, il y a des voitures et des vendeurs de noisettes dans le village) qui puise sa force dans nos souvenirs archétypaux communs.

L’œuvre de Poitras est comme un diapason, nous sentons ses vibrations en nous. Nous reconnaissons la fréquence, enfouie profondément dans notre psyché. Il s’agit d’une histoire immédiatement familière, mais tout à fait unique, qui se déroule avec la logique ineffable d’un rêve, d’un souvenir d’événements que nous n’avons pas encore vécus.

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